la localisation des gènes
I- GROUPE DE LIAISONS

II- RECOMBINAISONS ET CARTES FACTORIELLES

III- PREUVES DE LA LOCALISATION CHROMOSOMIQUE DES GÈNES CHEZ L'HOMME
 

I - GROUPE DE LIAISON:

L'analyse  de divers  croisements  expérimentaux  effectués  chez  la Drosophile a conduit MORGAN et son équipe à émettre l'hypothèse que les gènes sont réunis au sein de groupes de liaison. La probabilité pour qu'une rupture de liaison se produise sur un long segment étant plus grande que Si le segment de liaison est court, la fréquence des recombinaisons entre deux gènes liés doit permettre d'estimer l'écart qui les sépare : les gènes liés qui se recombinent  rarement  doivent être plus rapprochés  que ceux qui se recombinent avec une fréquence élevée.

- La longueur totale du génome humain est estimée à 3.109 pb =30 M

-1 M =108pb

-1 CM =106pb.

II - RECOMBINAISONS ET CARTES FACTORIELLES:
Les gènes que se disjoignent de façon indépendante  appartiennent  à des groupes de liaison différents, c.à.d
- sont portés par des chromosomes différents
- ségrégent de façon aléatoire lors de la méiose.
Les gènes liés sont portés par un même chromosome, et ne peuvent être séparés au moment de la méiose que s'il se produit une rupture  du chromosome lui-même
Les crossing-over sont des ruptures décelables cytologiquement. Ils se produisent  entre  deux  chromosomes  homologues  pendant  la première division de méiose.

Cartes factorielles : Dès 1913, Sturtevant avait admis que plus 2 gènes sont éloignés l'un de l'autre, plus le taux de recombinaison qu'ils présentent est élevé, et que plus ils sont rapprochés, plus ce taux est faible. Ainsi, le pourcentage  de  recombinaison  existant  entre  deux  gènes  liés  reflète exactement la distance qui les sépare.
L'étude du taux de recombinaison  de différents caractères pris deux à deux permet  donc l'établissement  des cartes  factorielles  définissant  la séquence des gènes et la distance qui les sépare.

1°- Distance : Soit deux gènes liés A et B et leurs allèles récessifs a et b. Il existe donc un chromosome de type AB et un chromosome de type ab. Étudions les possibilités de crossing-over chez un sujet hétérozygote AB/ab
* Si les deux gènes occupent des locus très éloignés l'un de l'autre, le taux des recombinaisons sera très élevé.
* Si les gènes sont situés sur des locus très voisins, il y a très peu d e chances pour qu'un crossing-over les sépare. Le taux de recombinaison est très faible.
* Il peut arriver que des locus très rapprochés ne soient pratiquement jamais séparés par crossing-over.

2° - Additivité des distances  : Considérons, chez la drosophile, trois gènes liés gl, e et ss. On cherche à déterminer leurs positions relatives sur le chromosome. Trois séquences sont possibles : 
gl    e   ss
e    gl   ss 
e    ss   gl
On effectue les 3 croisements dihybrides possibles du type (homozygote récessif  x hétérozygote F1)  impliquant respectivement les caractères:
gl et e
e et ss
gl et ss
On obtient ainsi les taux de recombinaison, c.à.d les distances en unités (centimorgans) entre les gènes pris deux à deux.
Ces distances doivent être additives  la fréquence des remaniements sur les deux intervalles adjacents définis par les locus des trois gènes.

F1: (++) gle//++   x   homo récessif: (gle) gle//gle

Ce croisement donne 8 % de recombinants  la distance entre gl et e est de 8 unités.

F1: (++) glss//++   x   homo récessif: (glss) glss//glss

Ce croisement donne 5%  de recombinants  la distance entre gl et ss est de 5 unités.
On voit immédiatement que la séquence gl e ss est exclue puisque la distance entre gl et e est plus grande que la distance entre gl et ss.
On réalise alors:

F1: (++) ess//++   x   homo récessif: (ess) ess//ess

- Si le croisement donne 3%  de recombinants, la distance entre e et ss est de
3 unités et la séquence est forcement e-ss-gl.
- Si le croisement donne 13 % de recombinants, la distance entre e et ss est
de 13 unités et la séquence est forcement e-gl-ss.
Dans la réalité, on constate que c'est ce dernier cas qui est bon  on a bien la séquence e-gl-ss.
3 - Limite de l'additivité des distances lorsqu'on étudie sur des chromosomes longs, tels que ceux de l'espèce humaine, deux gènes A et F dont les locus sont séparés par un intervalle important, on utilise des gènes B, C, D, et E connus se trouvant dans cet intervalle.
On constate que' la distance calculée section par section, AB + BC + CD + DE + EF est plus grande que la distance AF déterminée  directement.
C'est la situation  d'un grand  fragment  AF, ou 2 crossing-over  se produisent simultanément  et on ne compte qu'un  seul. La fréquence  de recombinaison et, par conséquent, la distance sont sous estimées.
 

III - PREUVES DE LA LOCALISATION CHROMOSOMIQUE DES GÈNES CHEZ L'HOMME:
  Dès 1890, les cytologistes avaient observé qu'un des chromosomes du lot haploïde  ne possédait  pas toujours  un partenaire  identique,  (chez l'homme XY pour le mâle, alors que a femme  possède  2 chromosomes identiques XX).

  L'étude des recombinaisons, pour établir une carte chromosomique, se prête moins bien chez l'homme que chez d'autres espèces
Une méthode classique a été utilisée, elle consiste à suivre le mode de transmission  de certains  caractères  (groupes  sanguins,  par exemple)  à travers plusieurs générations d'une même famille, afin de déceler ceux qui peuvent être liés, puis éventuellement,  d'établir une corrélation entre ces caractères et tel ou tel chromosome du caryotype. Cependant, depuis une vingtaine d'années, la localisation des gènes sur les chromosomes humains progresse de façon rapide avec la mise en œuvre de techniques nouvelles
- hybridation cellulaire
- hybridation in situ sur caryotype
- hybridation somatique interspécifique
- clonage par les méthodes de la génétique moléculaire.
Grâce à des nouvelles techniques  de génétique moléculaire, une carte génétique du génome humain est maintenant presque  faite. On peut par conséquent utiliser cette technique pour chercher des liaisons génétiques entre un caractère commun et une tare qu'on veut localiser. Les résultats obtenus nécessitent par la suite une analyse statistique  très compliquée, réalisée par ordinateur.

   A - Transmission des caractères liés au sexe:
1°- Chromosomes sexuels
Le sexe génétique femelle se caractérise par 22 paires d'autosomes (AA) et 2 chromosomes  homologues (XX), et le sexe génétique  mâle s e caractérise par 22 paires d'autosomes (AA) et 2 chromosomes hétérologues (XY). La simple étude de la transmission de certains caractères montre qu'ils sont liés aux chromosomes X et Y

2° - Présence de gènes "masculinisants" sur le chromosome Y:
L'étude de cas cliniques, où des anomalies portant sur le nombre des chromosomes sexuels sont observées dans le caryotype d'un sujet, montre que  c'est la présence  du  chromosome  Y qui  est  responsable  de  la différenciation dans le sens mâle des caractères sexuels phénotypiques. En l'absence de chromosome  Y les caractères  sexuels évoluent dans le sens féminin.
Les sujets AA + XX sont des femmes normales
Les sujets AA + XO sont de caractère féminin mais stérile : c'est le syndrome de TURNER.
Les sujets AA + XXX sont de phénotype féminin avec quelques caractères pathologiques
Les sujets AA + XY ont le phénotype d'un homme normal
les sujets AA + XXY ont le phénotype masculin, mais sont stériles. 
Les sujets AA + XYY ont le phénotype d'un homme normal
A la lumière de ces données, on a recherché la présence  de gènes masculinisants sur le chromosome Y. En fait, ce chromosome ne porte qu'un très petit nombre de gènes.

a - Gènes portés par le chromosome Y:
Parmi les locus identifiés on peut retenir
- Les locus MIC2 et YgR, localisés sur la région pseudo-autosomale et existant donc à la fois sur X et sur Y.
° MIC2 code pour un gène de groupe sanguin
° YgR est un gène régulateur de l'expression de MIC2

- Les locus ZFY et TSPY sont situés sur le petit bras du chromosome Y en dehors de la région pseudo-autosomale.
ZFY porte un gène de régulation qui code pour une protéine digitée (Zinc finger Y) capable de s’associer à l'ADN, et donc de contrôler l'expression d'autres gènes.
ZFY et TSPY interviendraient lors de la formation des gamètes chez le mâle, mais ne jouent pas de rôle dans la différenciation initiale du sexe mâle

- deux autres gênes (AZF et HY), qui ont été identifiés sur le grand bras de Y.
· AZF est impliqué dans la formation des gamètes mâles.
HY est un gène de régulation contrôlant l'expression d'une protéine présente à la surface de toutes les cellules des mâles génétiques.
 

b - Le gène masculinisant
En 1990, on a mis en évidence le gène SRY (sexe determining region of the Y), qui occupe un locus localisé sur le petit bras de Y, juste en dessous d e la région pseudo-autosomale.  Ce gène code pour une petite protéine  d e régulation et on a montré, en 1991, qu'il est effectivement le responsable initial de la masculinisation de l'organisme : il agirait en déclenchant l'activité d'autres gènes cibles (autosomiques ou portés par les chromosomes sexuels) responsables dans un premier temps de la différenciation mâle de la gonade

3° - Transmission d'une tare due à un gène récessif porté par le chromosome X:
On prend comme exemple le DALTONISME.
C'est  une affection relativement fréquente (4 % des sujets dans l'espèce humaine) qui se manifeste par le fait que les sujets atteints ne parviennent pas à distinguer certaines couleurs, et en particulier le rouge et le vert.

a - Si un sujet daltonien de sexe mâle (d) Xd/Y, épouse une femme normale (d+) Xd+/Xd+, on a: 

(d):Xd/y  X  (d+):Xd+/Xd+
Xd Y
Xd+ Xd+/Xd Xd+/Y
Xd+ Xd+/Xd Xd+/Y
les garçons sont sains
les filles sont porteuses de la maladie

b - Si un sujet daltonien de sexe mâle (d) : Xd/Y, épouse une femme porteuse du trait.
On a:

(d):Xd/Y  X  (d+): Xd+/Xd.


Xd Y
Xd+ Xd+/Xd Xd+/Y
Xd Xd+/Xd Xd/Y
25%: filles porteuses
25%: filles malades
25%: garçons normaux
25%: garçons malades

c - Si on prend le cas d'une femme malade qui épouse un homme sain

 (d+) Xd+/Y  (d) Xd/Xd
les garçons sont malades
les filles sont porteuses

d - Si une femme porteuse épouse un homme sain, on a

(d+)Xd+/Y   X   (d+)Xd+/Xd
25%: filles porteuses
25%: filles saines
25%: garçons sains
25%: garçons malades
En Conclusion,
On constate que tous les individus de sexe mâle qui possèdent un facteur muté sur le chromosome X expriment l'anomalie. En effet ce facteur bien que récessif n'est pas contrebalancé dans son expression par un allèle dominant sauvage. Il existe chez l'homme un seul chromosome X: les sujets sont dits hémizygotes pour le facteur considéré. L'étude d'une transmission de ce type nous permet de localiser un gène sur le chromosome X.

4° - Transmission d'une tare due à un gène dominant porté par le chromosome X:
On ne connaît qu'un petit nombre d'affections qui se transmettent d e cette manière. Exemple  le rachitisme vitamino-résistant.  Cette maladie s e traduit par des déformations  osseuses qui affectent surtout les membres inférieurs, et peut aboutir à un nanisme dysharmonieux. La prescription d e vitamine D aux doses habituelles n'est suivie d'aucun effet.
L'analyse de pedigree portant sur 69 familles montre que 45 femmes malades  (on admet qu'elles  sont hétérozygotes)  ont engendré  24 filles normales, 24 filles malades, 22 garçons normaux et 26 garçons rachitiques. En revanche 24 hommes rachitiques ont eu 29 filles, toutes malades, et 25 garçons, tous sains. Les observations permettent d'affirmer que la tare est gouvernée par un gène dominant porté par le chromosome x

5°- Transmission d'une tare due à un gène porté par le chromosome Y:
Aucun gène "marqueur" correspondant à ce mode de transmission n'est connu avec certitude.
 
 

   B - Hybridation somatique et carte chromosomique:

Technique de l'hybridation somatique
La réalisation  des cellules hybrides  somatiques  entre  une  lignée animale  et des  souches  humaines  normales  ou porteuses  d'anomalies chromosomiques  a permis  de  localiser  de  nombreux  locus  sur  les chromosomes  humains.  On note que c'est toujours  le chromosome  d e l'organisme supérieur qui se perd. La perte du chromosome s'accompagne de la disparition des caractères portés par ce chromosome.
La coloration séquentielle de bandes permet d'établir avec une grande précision  une  véritable  topographie  de  chacun  des  chromosomes  du caryotype.  Quatre systèmes  majeurs  de bandes  sont mis en évidence, permettant de révéler jusqu'à 3000 bandes caractéristiques pour l'ensemble des chromosomes
Bande Q : permet de distinguer les zones riches en Guanine.
Bande G : elle se superpose aux bandes Q et caractérise un ADN dont la réplication intervient tardivement à la fin de la phase S.
Bandes R : la répartition de ces bandes, qui correspondent à un ADN à réplication précoce, est inversée par rapport aux systèmes Q et G.
Bandes C elles correspondent aux segments hétérochromatiques  des chromosomes, riches en ADN satellite (centromères et télomères)
En pratique, les caryotypes des clones hybrides sont déterminés et une étude du phénotype,  dont on veut localiser le gène correspondant,  est effectuée par des techniques biochimiques.
Cette recherche entreprise vise à découvrir
- sur quel chromosome se situe un gène particulier, et quels sont les gènes qui lui sont liés
Si dans quatre  hybrides A B C D E homme-souris,  on a seulement 4 chromosomes  humains (1 2 3 et  6),  la  recherche  des  enzymes  par éléctrophorèse correspondant aux enzymes I, I!, III et IV a donné le tableau suivant:
 
A B C D E
 enzymes     I
 humains     II
                    III
                   IV
+
-
+
-
-
+
-
-
-
-
-
-
+
+
+
-
-
-
-
-
chromosomes1 humains 2
3
-
+
-
-
+
-
-
-
-
-
-
+
+
+
+
-
-
-
+
-
Interprétation
                                      Chromo
 Enzyme I                        2
 Enzyme Il                        1
 Enzyme III                       2
 Enzyme IV                      absence sur les 4 chromosomes étudiés

- La localisation plus précise d'un gène
Dans certaines situations, il arrive qu'une partie du chromosome est déletée et un phénotype disparaît en même temps. On pourra alors localiser le gène correspondant sur la région déletée du même chromosome.
Fixé dans la population, il entraînera un nouveau phénotype. Ceci crée dans le temps le polymorphisme de population.

 C - La génétique inverse:
Les principales étapes d'une analyse génétique inverse sont.
1. Recueillir les données sur 2-3 générations d'une même famille
2. Établir un diagnostic clinique précis permettant d'identifier sans ambiguïté les
  témoins et 'les malades.
3. Collecter le sang des sujets et isoler l'ADN à partir des noyaux des seules cellules
  nucléées du sang  les globules blancs.
4. Établir l'arbre généalogique de la famille.
5. Rechercher un polymorphisme de l'ADN par plusieurs marqueurs de polymorphisme
  de topographie connue.
6. Développer des marqueurs les plus proches possibles du locus morbide.
7. Isoler, cloner et identifier le ou les, gène(s) en cause.
8. Séquencer le gène et identifier la mutation causale.
9. Parfois rechercher la fonction normale de la protéine ainsi trouvée.
10. Démontrer la relation causale entre protéine anormale et maladie
11. Développer un test pour un criblage rapide.
12. Développer Si possible une thérapie génique (substitutive ou par les gènes).

Exemple
Localisation du locus (DFNB2) responsable  d'une surdité héréditaire autosomique récessive.

sommaire